La crise sanitaire nous l’a prouvé : face à l’incertitude, les business model résilients résistent. Concilier sens et profit dans son core business est une stratégie gagnante à privilégier et des opportunités sont à saisir. Virginie Smans, coordinatrice de greenlab.brussels, l‘accélérateur d’entreprises durables en est convaincue : “il y a un fort potentiel de production industrielle qui pourrait être rapatrié sur notre territoire”.
Avec le greenlab, vous avez accompagné des dizaines d’entrepreneurs dans des projets durables à forte valeur ajoutée. Depuis quelques années, vous semblez observer une systématique chez les entrepreneurs à prendre en compte la durabilité et la circularité dans la création de leur projet ?
Oui, chaque année, la prise de conscience se confirme et elle ne fait que croître. On reçoit au greenlab énormément de candidatures. Avec la crise sanitaire, on s’est demandé si les porteurs de projets seraient bien présents. On pensait que la pandémie allait les freiner, amener des questionnements et une sorte de frilosité à entreprendre. C’est tout le contraire qui s’est passé : il y a eu un boum des candidatures. Je pense que les gens ont pris le temps de se poser, de réfléchir, ce fut une période particulièrement introspective. Certains ont perdu leur emploi, malheureusement. Et, il y en a beaucoup qui se sont dit : “quitte à être en période de changement, autant y aller, tenter le tout pour le tout et faire autrement”. Et donc cette année, on a reçu beaucoup de candidatures. Et à tel point qu'en fait, on a sélectionné 18 projets au lieu de 15 projets habituellement...
Vos valeurs sont notamment centrées autour de l’aspect green et de l’aspect local, le lien entre les deux est-il si évident?
Oui, c’est certain que l’aspect green va souvent de pair avec l’aspect local, mais ce n’est pas toujours le cas. En effet, il y a beaucoup de productions qui sont décentralisées, sourcées à l'étranger, parfois même à l'autre bout du monde. Les choses changent et vont dans le bon sens. Quand on prend le temps de creuser, on constate qu’il y a tout un tas de choses qu’on pourrait très bien faire ici, en Belgique. Il y a un fort potentiel de production industrielle qui pourrait être rapatrié sur notre territoire. Cette année, on a d'ailleurs plusieurs projets inscrits dans le greenlab qui sont d’envergures industrielles...
Ce que vous dites signifie que cela va bouger au niveau local dans les années à venir. On ne peut que s’en réjouir ! Avez-vous des exemples concrets à nous partager ?
On a souvent accompagné la création de petits commerces de proximité, d’épiceries en vrac. Je m’en réjouis car c’est essentiel, il en faudrait à tous les coins de rue, mais nous avons également l’ambition d’accompagner des projets de “scaling-up” qui ont pour but de croître rapidement. Je pense à des porteurs de projet qui ont eu l’idée de s’attaquer au retraitement de nos vêtements.
Si l’upcycling est une bonne chose, les fibres présents dans les habits s'abîment et nos vêtements finissent tôt ou tard pas être jetés. Ce projet a pour objectif le retraitement textile à partir d’une machine industrielle développée en Belgique ! L’usine va s’implanter directement à Bruxelles, c’est très gai de se dire qu’on ne sera plus obligé d’envoyer les vêtements à l’étranger.
Avez-vous le sentiment que le COVID a pu stimuler l’entrepreneuriat durable ?
C'est une période où tout est chamboulé. Le premier confinement a permis à beaucoup de personnes de se poser les bonnes questions et de prendre le temps de se les poser…
Les porteurs de projets que vous suivez ont dû eux aussi passer en mode digital comment cela s’est-il passé ?
J’ai constaté une résilience absolument incroyable chez eux. Le confinement a eu lieu en pleine période de “test” de leur projet. Ce n’était donc vraiment pas un bon timing... , mais ils ont su faire preuve de créativité ! Je pense au projet “ Freddy Met Curry”. À l’origine, ils voulaient développer un service de lunchs zéro déchet, locaux et de saison à destination des entreprises pour les employés. Le confinement ayant lieu, tous les employés travaillaient à la maison. Ils ont tout de suite rebondi en proposant aux employés de les livrer directement à la maison et leur service a cartonné! Aujourd’hui, ils ne sont plus orientés uniquement BTOB, ils sont également tournés vers le B2C. Un combo gagnant contraint par le Covid et qui s’est transformé en une réelle opportunité de marché !
Qu’avez-vous envie de souhaiter à la communauté de Wikipreneurs ?
2020 a été, je pense, quand même assez dur pour tout le monde. Pourtant, je ne peux pas m'empêcher de me dire qu’il va se passer de belles choses cette année. J'ai envie d'y croire, il faut s'accrocher !